Ah, le serpent de mer ! Les plus purs supporters de l’Aviron ou du Biarritz Olympique s’étrangleront certainement à la lecture de cette chronique : c’est voulu. Mais cela fait-il sens, encore aujourd’hui, de voir l’identité basque partagée de la sorte entre ces deux clubs voisins de sept kilomètres seulement quand le rugby professionnel, tel qu’il est lancé depuis bientôt dix-sept ans, façonne, année après année, des « mégaloclubs », véritables entités régionales ?
Le réalisme économique qui prévaut désormais pousserait à répondre, d’emblée, un non catégorique. La tradition, l’attachement culturel et identitaire à un club, donc à l’opposition à l’autre, font pourtant qu’un tel projet n’est pour le moment qu’un fantasme. Pour combien de temps encore ? La situation sportive actuelle des deux clubs aux deux dernières places du Top 14 après seize journées, même passagère, donne encore plus de sens à ces interrogations.
Dernièrement, deux figures du rugby basque se sont exprimées sur ce sujet et l’on comprend que l’idée fait son chemin. C’était dans L’Equipe. Patrice Lagisquet (Bayonnais pendant dix ans, Biarrot depuis vingt ans), d’abord, le 19 janvier : « Je pense qu’elle (une entité basque unique, ndlr) ferait un bien fou. Un club aux couleurs du Pays basque serait inévitablement supporté par beaucoup de monde et pourrait avoir une belle ambition, à l’image de clubs comme Toulouse ou Clermont. On pourrait bâtir une très belle équipe. Mais c’est un point de vue totalement personnel et on en reste là. Pour l’instant, je ne pense pas que les élus et les présidents soient convaincus de tout cela. La seule crainte que j’ai, c’est qu’un jour les deux clubs aillent mal et que ça se fasse dans des conditions qui ne sont pas favorables. Deux malades, ça fait rarement un bien portant. »
Et le lundi 30 janvier, Imanol Harinordoquy, originaire de Saint-Jean-Pied-de-Port à l’intérieur des terres, Biarrot depuis 2004. Interrogé par Renaud Bourel, il répondait : « Personnellement, je suis très attaché et ancré à Biarritz. (…) C’est la ville où je me sens bien et que je défends. D’un autre côté, même si je n’aime pas envisager le pire, je ne serai pas contre.
- Est-ce le sens de l’histoire ?
- Ça fait longtemps qu’on en parle. Rassembler les forces vives pour créer un grand club du Pays basque, c’est une idée qui ne me déplairait pas, même si je ne serai plus sur le terrain le jour où ça arrivera.
- Aimeriez-vous vous engager dans un tel projet ?
- Oui, mais c’est avant tout un sujet sensible et politique. Ce sont d’ailleurs les politiques qui décideront. Dans l’idéal, je suis pour que les deux clubs continuent d’exister. (…) »
Idéal, politique… Ego, souvent. Serge Blanco, Alain Afflelou, les présidents, Jean Grenet (maire UMP de Bayonne), Didier Borotra (maire Modem de Biarritz) : quelle vision du moyen terme ont ces décideurs ? Quelle ambition ? Quel rêve pour leur club ? Celui, égotique et orgueilleux, de le maintenir seul coûte que coûte en première div ?
Les détracteurs d’une fusion arguent que 1+1 ne ferait pas 2 mais 1,2 (en termes de budget*, d’affluence, etc.). A très court terme, ils ont certainement raison. Deux sponsors, par exemple, ne se partageraient pas le maillot pour le prix d’exclusivité qu’ils payent chacun aujourd’hui. Mais voyons à quelques années, avec un stade moderne unique (je ne parle même pas des économies d’échelle au niveau des soutiens et des investissements publics) et non deux stades améliorés petit à petit avec les moyens du bord – ce stade dont le rugby français a fait à juste titre le cœur de son développement économique**. Actuellement, Aguilera n’offre que 9.500 places assises… Imaginons le public forcément nombreux et relisons les propos de Lagisquet sur l’ambition qu’une telle assise permettrait. On pourrait même rêver à une académie de formation régionale et voir, comme c’est le cas du côté catalan des Pyrénées, de nombreux joueurs du cru constituer l’équipe première.
Aux confins de l’Isère, du Lyonnais et du Dauphiné, dans une région certes moins porteuse du point de vue populaire et moins ancrée dans le rugby mais très productrice de talents, Bourgoin, Grenoble et le LOU ont persisté dans la voie individuelle avec les résultats que l’on sait : à quand une équipe de cette région assise durablement en Top 14 ?
Biarritz avec ses 26.000 habitants est la plus petite ville du Top 14. Bayonne avec ses 44.000 la quatrième plus petite. La communauté d’agglomération, le fameux BAB qui comprend également Anglet, Bidart et Boucau, atteint les 124.000 habitants. C’est un tout autre bassin économique que n’aurait plus à se partager deux clubs. Et ce grand bassin démographique qui, tout entier, pousserait désormais derrière une seule équipe basque. C’est le sens de l’histoire… A moins que l’un et l’autre, soutenus chacun par un sponsor-mécène (Serge Kampf-Cap Gemini au BO, Afflelou à l’Aviron), attendent la chute sportive de son concurrent pour récupérer le gâteau entier. Mais contrairement à Paris, le Pays basque n’aura plus longtemps les moyens de se payer deux clubs en Top 14.
Alors, pour ou contre la fusion ?
* Budgets prévisionnels Bayonne : 17,21 millions € Biarritz : 16,61 millions € Budget prévisionnel moyen Top 14 : 17,89 millions €
** Bernard Laporte avait été introduit à l’Aviron par Afflelou notamment pour faire avancer grâce à son carnet d’adresse d’ex-Ministre le projet de nouveau stade
Chroniques
Seriez-vous pour une fusion Bayonne-Biarritz ?
Est-il encore logique de voir l’identité basque partagée entre le BO et l'AB quand le rugby professionnel, façonne année après année de véritables entités régionales ?
Par
Ludovic Ninet
09/02/2012 à 15h45
leptivalou76
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moi faut qu'on me dise ce que voient les gens par "fusion" enfin le principe , l'interet de faire ca ? je pense ne pas avoir la même définition . Parce que dans ce cas faisons une fusion racing-SF et nommons la je sais pas club île de france ... et puis on peut surement en faire d'autre et puis on appelle notre championnat genre séléction régional professionnel un délire comme ca non ? c'est pas une critique méchante loin de la puisque j'aime beaucoup ce pays qui est le pays basque , j'y vais souvent hein mais je pense que dans le domaine du rugby , ils sont trop fier et n'accepte pas certaines choses , dans le cas présents c'est l'infériorité par rapport aux autres ... ( je répète c'est pas méchant , juste un petit défaut que je relèverais, et c'est un avis perso ,si des basques le prennent mal et qu'ils ne sont pas d'accord , nous sommes la pour partager . )
Nicolas Rousse
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7769 caractères, 1163 mots, c'est beaucoup plus que les articles du Rugbynistère et c'est de loin le commentaire le plus long jamais posté sur le site. Bravo ! Il n'en est pas moins intéressant, merci à toi de contribuer de la sorte au débat ! Amicalement, Nicolas
leptivalou76
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je ne vois vraiment pas l'interet de faire ca ! Deux clubs basques aux budget assz simpa même si moins élevés que certains , qui galère en championnat et qui risque de descendre mais c'est le jeu alors si on commence a faire des ententes au niveau pro on a pas fini !! Quand le racing etait en pro D2 , avons nous entendu parlé d'entente avec SF ?
philbf
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la question ne devrait même pas se poser, quels que soient nos avis perso, ce qu'on aime ou pas, c'est la seule voie qui se propose dans cette société actuelle...donc OUI, pour la fusion, pas parce que qu'on en veut vraiment, mais parce que c'est la seule possibilité!
Serge Karamazov
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Je pense que la fusion des équipes professionnelles est le seule issue pour l'avenir du rugby pro au Pays Basque. Car fusion des équipes pro ne veut pas dire disparition des clubs associatifs. Ce qui se passe à Bordeaux en est la preuve. Certes l'UBB, malgré son très beau parcours, est encore fragile cartes. Mais ils sont dans le vrai, même si cela pose encore quelques problèmes et notamment politique. Mais au final, cette fusion est la bonne solution pour une ville de la taille de Bordeaux . Et la fusion des équipes pro de Bègles et du Stade Bordelais n'a pas fait disparaître les 2 clubs historiques. Le professionnalisme pousse à la concentration des moyens. C'est la logique "marchande" du sport pro. Seule Paris peut avoir 2 clubs grâce à la taille de son agglomération. En Haute-Garonne, Colomiers ne pourra plus rivaliser avec le Stade Toulousain, de même que Mont-de-Marsan et Dax devront aussi se poser la question. Et comme c'est écrit dans l'édito, Lyon, Grenoble et Bourgoin devront également y réfléchir. C'est Fouroux qui, il y a une 20aine (voire peut-être plus), parlait de la création de franchise régionale. Il avait juste raison mais 20 ans trop tôt !