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ENTRETIEN. Du 7 à Mexico, découvrez la folle retraite 100% rugby de Terry Bouhraoua

Légende du rugby à 7 français, Terry Bouhraoua profite de sa retraite à l’autre bout du globe où il s'est installé à Mexico entraîne la sélection du Mexique.

Erwan Harzic 18/02/2024 à 18h50
Légende du rugby à 7 français, Terry Bouhraoua profite de sa retraite à l’autre bout du globe où il s'est installé à Mexico entraîne la sélection du Mexique.
Légende du rugby à 7 français, Terry Bouhraoua profite de sa retraite à l’autre bout du globe où il s'est installé à Mexico entraîne la sélection du Mexique.

Parti il y a 11 mois, Terry Bouhraoua affine son plan. Vadrouilleur depuis ses premiers pas dans le rugby à 7, en 2010, l’ancien capitaine de l’équipe de France de rugby à 7 découvre de nouveaux horizons. Il occupe le poste de directeur sportif de la fédération mexicaine de rugby et entraîne aussi la sélection masculine de rugby à 7. Dans ce petit pays de rugby aux frontières titanesques, le recordman du nombre de points (1502) et d’essais (160) inscrits avec France 7 nous raconte son voyage.

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Bonjour Terry, comment es-tu arrivé au Mexique ?

J’avais le contact de l’ancien président, Francisco Echeguren. Je l’ai rencontré il y a une dizaine d’années, lors du tournoi de Hong-Kong où le Mexique avait été invité à participer. Il parle français, donc on s’est retrouvé à parler et depuis on est resté en contact. Quand j’ai pris ma retraite, j’ai pris le temps de digérer, puis j’ai eu le désir de me sentir utile. Je voulais partager ce que le rugby avait pu me donner. Au fil d’une discussion, j’en ai parlé à Francisco et il m’a mis en contact avec son successeur, Ernesto Sainz, en 2021. On a discuté et on a trouvé un compromis. Le rugby au Mexique, ce n’est pas énorme, mais il y a une petite communauté et ça me permet de voir ce qu’il y a de l’autre côté de la barrière.

Comment as-tu vécu le fait d’être parti à l’autre bout du monde ?

Avec le rugby à 7, j’ai pris l’habitude de bouger un peu partout dans le monde. Ça m’a donné le goût du voyage. J’aime bien être en mouvement, ça me va bien.

Quel a été ton sentiment en arrivant à la tête de l’équipe de rugby à 7 du Mexique ?

Quand je suis arrivé, l’équipe était déjà en route. Je n’ai pas inventé le rugby, que ça soit ici ou ailleurs. Le groupe était en place et j’ai juste à y poser ma marque. En plus, j’ai eu de la chance, les Jeux d'Amérique centrale et des Caraïbes ont eu lieu peu de temps après mon arrivée. C’était pratique de disputer rapidement une compétition, afin de jauger l’équipe.

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Tu as des ambitions avec cette équipe ?

Pour le Mexique, l’espoir d’une médaille d’or se focalise sur les Jeux d'Amérique centrale et des Caraïbes. Les prochains arrivent dans 3 ans, donc je me concentre là-dessus. D’ici à ce qu’on arrive à cette échéance, on cherche à travailler, on veut faire grandir les joueurs. Après, on se balade dans le pays et on parle aux entraîneurs, afin de trouver les joueurs qui correspondent à nos ambitions.

Et quel est l’état de la culture rugby au Mexique ?

Ici, elle est très pauvre, même s’il y a quelques passionnés. On est sur un système amateur, où les joueurs sont au travail ou à l’université. Il y a bien un championnat à XV, mais il est d’un niveau assez faible… Il n’y a pas 40 équipes, le pays est très grand et toutes les équipes sont amateurs, donc elle n’a pas forcément les moyens de se déplacer. Pour ce qui est du rugby à 7, il passe beaucoup par les universités. Certaines offrent des bourses et permettent aux joueurs de s’entraîner durant toute la semaine, même s’il n’y a pas énormément de compétition.

Tu as connu le rugby avant qu’il soit olympique, tu penses que son intronisation aux JO l’aide à se développer dans des pays à la culture rugby moins développée ?

Bien sûr, mais ça n’a pas affecté que les petites nations. L’équipe de France a commencé à se professionnaliser, car la discipline est devenue olympique. Ça provoque de l’intérêt et les pays ont tout intérêt à s’y intéresser s’ils veulent des médailles.

Avant, des équipes disposaient d'invitations sur le circuit mondial. Le Mexique en avait connu quelques unes…

Ça n’existe plus avec la nouvelle organisation. C’est dommage, car si je suis là, c’est justement parce que les mexicains avaient été invités à Hong Kong. Ensuite, les filles avaient été invitées à Los Angeles et les garçons étaient revenus pour jouer à Vancouver…

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Est-ce un objectif d’amener ta sélection au SVNS, la nouvelle formule du circuit mondial ?

Non, on est très loin de tout ça. Nous, ce qu’on a, ce sont les Jeux d'Amérique centrale et des Caraïbes et le Tournoi d’Amérique du Nord, qui nous permet de nous qualifier au Challenger Series (NDLR : tournoi de promotion vers le SVNS). Cette année, on participe à ce dernier et le but, c'est de se qualifier à ces compétitions le plus souvent possibles. On est allé à Dubaï pour la première étape du Challenger Series, puis on ira en Uruguay et en Allemagne et on finira par le Tournoi de repêchage olympique. Ce sont des gros rendez-vous où je n’attends pas forcément de résultat, on s’entraîne surtout à jouer contre meilleur que nous.

Et comment tu mobilises tes joueurs pour de tels évènements ?

On essaye de trouver des moyens de s’entraîner. Mon travail, c’est de les amener à s’entraîner plus souvent et dans des meilleures conditions. Avec des préparateurs physiques, on essaye aussi de leur donner du travail de leur côté. On fait confiance aux joueurs. Après, j’ai dit que c’était une petite communauté, mais ce sont des passionnés de rugby, ils en regardent et ils aiment ce sport. Quand on leur propose un Challenger Series pour aller jouer des matches internationaux, ils se sentent concernés. Après, il faut faire en sorte que sur les matches, on existe au moins un petit peu.

D'un point de vue personnel, ta vie au Mexique se passe comment ?

Je suis parti tout seul. C’est ma vie du moment. Je suis parti pour vivre l’aventure et apprendre un nouveau travail et je suis servi ! Et franchement, il y a pire que le Mexique. C’est un chouette pays, il fait beau et on mange bien. C’est moins dangereux que ce que les chaînes de télé nous montrent. Le pays est gorgé d’histoire et les paysages sont magnifiques.

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Si un jour, on te propose de venir travailler en France, chez les Bleus du 7 par exemple, ça te plairait ou tu préfères vadrouiller ?

Ce que j’aime, c’est transmettre quelque chose et me sentir utile. Si un jour, ça doit être avec l’équipe de France et qu’on me demande de faire ça, ça sera avec plaisir. Le plus important pour moi, c’est le rugby. Ce n’est pas forcément d’aller à droite ou à gauche, même si j’aime bien ça.

Tu continues de suivre les aventures de tes anciens copains du rugby à 7 français ?

Bien sûr, le rugby, c’est en moi. C’est une partie de moi, donc je continue de suivre. J’échange avec ma famille en France et on parle. Je regarde les matchs et je reste accroché à tout ça.

La saison dernière, ils ont signé l’un des meilleurs exercices comptables de leur histoire. Tu sens bien les JO pour l’équipe de France masculine ?

Clairement, tout est réuni pour que ça se passe au mieux. Après, c'est du sport de haut niveau et tout se joue sur un tournoi, on ne peut quasiment rien prévoir. Ce dont je suis sûr, c’est que l’équipe de France a certaines forces et qu’elle est capable d’aller chercher une médaille d’or. Après, affirmer qu’elle va le faire, c’est autre chose. Il y a tellement de choses incontrôlables qui entrent en considération.

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Pour toi, les Français peuvent être champions olympique ?

Oui, je ne parle pas seulement de gagner une médaille. Certes, ils n’ont pas gagné de tournoi, mais pour moi, quand tu arrives en finale, c’est que tu as les moyens de gagner et les Bleus sont arrivés plusieurs fois en finale ces dernières années. S’ils n’y étaient jamais allés, j’aurais parlé d’espoir de médaille, mais là, elle peut aller au bout.

Comme beaucoup, tu as fait du XV avant de passer au rugby à 7 et tu as commencé en tant que demi de mêlée. Il y a un demi de mêlée plutôt bon qui va se mettre au 7 bientôt…

Oui, je vois (rires).

Quelle est la principale adaptation à ce poste entre les deux disciplines ?

C’est le physique, les efforts que l’on te demande de faire. Après, Antoine Dupont a une sacrée chance en tant que demi de mêlée, dans son profil. Lui, il est constamment au cœur du jeu. Il se propose tout le temps au rugby à XV, donc l’adaptation ne risque pas de lui poser de problème. D’un point de vue technique et tactique, il devrait pouvoir répondre présent. Il y a juste le physique, qui lui demandera une préparation un peu différente.

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Tu penses que deux tournois ça suffit à être bien préparé ?

Entre nous, on disait souvent qu’à partir de 5 tournois, on commençait à comprendre la logique du rugby à 7. Sauf que là, on ne parle pas d’un joueur normal. Pour Antoine Dupont, deux tournois, ça devrait être suffisant. Ensuite, il est d’une génération où, contrairement à la mienne, les jeunes jouent fréquemment au rugby à 7. Donc, ils sont habitués à cette discipline bien plus jeune. Sans le connaître personnellement, je pense que c’est un travailleur. Si on lui demande de faire plus d’efforts, il les fera.

Pour les JO de 2016, France 7 avait fait des tests avec des pros venus du XV, mais ça n’avait pas marché…

Il y avait uniquement Sofiane Guitoune, qui avait été retenu parmi les joueurs testés, mais même lui était venu en tant que joueur supplémentaire. Aucun joueur du XV n’avait finalement été retenu dans l’effectif. On avait essayé d’intégrer quelques noms lors du championnat d’Europe : Fulgence Ouedraogo, Romain Martial, Rémy Grosso, etc. À cette époque-là, le but, c'était de prendre des joueurs un peu plus développés physiquement et avec la mentalité du rugby professionnel. Mais pour la plupart des joueurs et peu importe les postes, le rugby à 7, c’est quelque chose de spécial. Il y a une préparation différente, ce n’est pas le même sport. Après, certains profils de jeu collent mieux que d’autres et c’est le cas d’Antoine Dupont, je pense. Là, on parle d’un joueur vraiment hors du commun.

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Et cet apport de joueurs venus du Top 14 n’est plus nécessaire désormais ? La considération du rugby à 7 a changé selon toi ?

Le système a changé ces dernières années. Les joueurs pratiquent beaucoup plus souvent le rugby à 7. Ils découvrent cette discipline beaucoup plus tôt et il y a plus de tournois, donc il pratique plus. On arrive à une époque où des profils de spécialistes du rugby à 7 apparaissent. Après, l’apport de joueurs comme Antoine Dupont, c’est différent. En fait, ça se joue surtout sur les profils de joueurs. Tout le monde n’a pas la capacité de s'adapter aux différentes situations de jeu, comme lui arrive à le faire. Vouloir rajouter des gens qui n’ont pas cette qualité à l’équipe de France, ça ne serait pas un cadeau.

Justement, certains joueurs intègrent les Bleus du 7 tôt et ne reviennent quasiment plus au XV, ce sont eux les spécialistes dont tu parles ?

Désormais, le rugby à 7 est considéré comme quelque chose d’indépendant. Depuis que c’est devenu olympique, ce n’est plus la même histoire. Des joueurs arrivent avec des profils adaptés en équipe de France et quand tu intègres le circuit mondial, tu ne joues que des matchs de très haut niveau. Tu ne t’ennuies jamais sur les terrains, donc s’ils sont compétiteurs, ils y vont et ils y restent.

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