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''On se retrouve avec quelqu'un d'autre dans son corps'' : le témoignage glaçant d'Antoine Burban sur les commotions cérébrales

Retraité des terrains depuis 2022, Antoine Burban se livre aujourd'hui sur l'impact des commotions cérébrales dans sa vie quotidienne, trop souvent minimisées.

Rémy Kasper 26/05/2025 à 12h40
Antoine Burban se livre sur la répercussion des commotions cérébrales dans sa vie. © Crédit photo : Screenshot L'Équipe
Antoine Burban se livre sur la répercussion des commotions cérébrales dans sa vie. © Crédit photo : Screenshot L'Équipe

On pensait cela réservé aux joueurs d'un autre temps, ceux où les commotions cérébrales n'étaient qu'un bruit de couloir à peine pris en considération. Cependant, ce fléau touche véritablement l'ensemble des joueurs de rugby, de toutes époques confondues, à l'image du récit de Sébastien Chabal à ce propos.

Le témoignage d'Antoine Burban, dans le documentaire À corps perdus de L'Équipe, raconte cette fois-ci les soucis que rencontre le rugby actuel vis-à-vis des commotions cérébrales.

"Je tombe et je ne sais même pas pourquoi" : le match de la bascule

À 34 ans, un soir de mars 2022 contre l'UBB, Antoine Burban s'écroule à la réception d'un coup d'envoi, mais il "ne sai[t] même pas pourquoi", raconte-t-il. En réalité il vient d'être plaqué, légalement, et relâche le ballon juste ensuite. Plus tard dans le match, sur un plaquage, il reçoit "des frissons dans tout le corps", une première dans sa carrière.

Sur cette rencontre-là, il se sent "évasif et [n'a] plus aucune notion du temps". Il décide d'être honnête avec ses soigneurs et de dire qu'il ne va pas bien. Il ne foulera plus jamais un terrain de rugby. 

S'ensuit alors une période très compliquée. Pendant longtemps, il ne se souvenait que partiellement de ce qu'il avait fait la veille, ne se rappelant "plus dans quel ordre", exprime l'ancien joueur. Et cela a commencé avant même 2022. Dès 2015-2016, il avait des petites pertes de mémoire sur "des trucs tout bêtes" comme "des numéros de téléphone ou des codes d'immeubles".

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Un changement de comportement radical

Même s'il a bénéficié des règles protégeant les chocs à la tête, Antoine Burban subit tout de même des séquelles dans sa vie quotidienne. Pendant quelque temps, il remarquait "un changement radical du comportement et de l'individu", à tel point qu'il avait l'impression de se retrouver "avec quelqu'un d'autre dans son corps". Cela se manifeste par une faculté à rapidement "exploser pour rien" telle "une cocotte-minute", déclare Antoine Burban. De quoi affecter sa vie de famille, une situation qui n'a d'ailleurs pas été facile à gérer.

Sa femme, Lucie, a subi les "réactions disproportionnées" de son mari "par rapport à des situations banales". "On se demande alors quelle personne on a en face de soi", ajoute-t-elle. Une situation d'autant plus difficile à gérer que des sentiments doubles s'instaurent. D'abord l'incompréhension, qui se mêle à une constatation : Antoine Burban en souffrait aussi. Des réactions qui "ne dépendai[ent] pas de lui, c'était incontrôlable". Il a donc fallu expliquer aux enfants que si "papa réagit comme ça, c'est à cause de ses coups sur la tête", conclut Lucie, qui affirme aujourd'hui que la situation s'est largement améliorée.

Trois ans après sa retraite professionnelle, les répercussions des commotions cérébrales sont tout de même encore présentes. Un domaine est affecté : le sommeil. Il est toujours difficile pour lui "de s'endormir, même en cas d'extrêmes fatigues", et il continue à faire des insomnies. "C'est compliqué", résume simplement Antoine Burban. Une prise de parole importante qui, on l'espère, contribuera à faire évoluer la prise en charge des chocs à la tête dans le rugby moderne.

alan75
alan75
L'auteur de l'article a-t-il relu son titre?
Frontonnais
Frontonnais
Ce qui est cool, c'est que ce genre de témoignage est désormais vraiment pris en compte pour faire évoluer la protection des joueurs par les arbitres. Exemple : le coup de genou de Buros sur la tête de Furbank. L'arbitre a tout de suite protégé le joueur. Buros a pu sortir pour se faire soigner.
Exemple 2 : Diaby et son tête contre tête, sans circonstance atténuante. La bonne couleur a effectivement été sortie.
Exemple 3 : match de Top14 TLS - RC92, tête contre tête de Joseph sur Chocobares, là aussi on sort la bonne couleur pour protéger les joueurs. C'est bien.
J'applaudis.
Comme mon fils de 12 qui m'a dit récemment : "Papa, finalement je ne veux pas faire de rugby l'année prochaine. C'est trop dangereux."
Vieille Gloire
Vieille Gloire
Un de plus, le témoignage d’Antoine Burban met en lumière une réalité trop longtemps ignorée : les commotions cérébrales ne sont pas des incidents bénins, elles ont un impact durable sur la vie des joueurs. Malgré les règles et protocoles actuels, ces blessures continuent de poser de graves problèmes, notamment sur le long terme (mémoire, sommeil, comportement). Il est urgent que le rugby, à tous les niveaux, renforce la prévention, le suivi médical et la sensibilisation. Parler ouvertement de ces conséquences, comme le fait Burban, est essentiel pour faire évoluer la culture du sport et protéger les joueurs d’aujourd’hui et de demain. À ce titre, imposer le placage au niveau de la hanche pourrait réduire les impacts dangereux à la tête, et une sanction dont la durée serait proportionnelle à l’invalidité subie par le joueur blessé responsabiliserait davantage les joueurs fautifs, contribuant ainsi à limiter les blessures graves.
mic4619
mic4619
Quand est ce que tous les joueurs et ex joueurs du monde souffrants de ces maux, vont monter une action de groupe pour déposer une plainte contre WR ?
potemkine09
potemkine09
Bon, le terme 'glaçant' repris à toutes les sauces m'énervent, et aussi parce que ça joue sur l'émotion. C'est bien que les joueurs parlent, ca pourra aider j'espère à ce que des decisions soient prises Quand on voit l'attentat d'Underhill sur Niniachvili, qu'il n'y a qu'un jaune et qu'il n'y a même pas de protocole commotion pour Niniachvili, on voit qu'il y a beaucoup de chemin à faire.
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