Si les compétences techniques et rugbystiques du sélectionneur Fabien Galthié sont reconnues de tous, sa gestion humaine laissait à désirer par le passé. Souvent critiqué pour avoir été trop brutal et peu diplomate envers certains joueurs lors de ses passages comme entraineur au Stade Français, à Montpellier et Toulon, l'accompagnement de Raphaël Ibanez comme manager du XV de France a permis à l'encadrement tricolore d'avoir une relation saine avec les joueurs. L'exigence de Galthié avec le haut niveau pouvait avoir des répercussions sur la vie de groupe, comparable à des méthodes managériales dans certains milieux professionnels. On se souvient notamment de ses multiples tensions avec le troisième ligne Matthieu Blin à Paris, sa fin d'aventure à Montpellier où les joueurs avaient révélé un personnage très froid, et enfin à Toulon où Mourad Boudjellal a trouvé la première excuse pour se passer de ses services.
Didier Bès, adjoint chargé des avants à Montpellier à l'époque Galthié, s'occupait de courber l'échine avec les joueurs. Un affectif regretté, que les joueurs appréciaient particulièrement. Car Galthié, adepte des anglicismes lorsqu'il était consultant sur France Télévision, révélait en fait peut-être une volonté d'appliquer une méthode de gestion compatible chez les Anglo-Saxons, mais pas forcément chez les Latins, où l'émotion et le côté sentimental joue énormément sur les performances. Alors, malgré tout, son arrivée en Équipe de France a été une réussite jusqu'à présent. Une remise en question de l'ancien demi de mêlée de Colomiers sur sa manière de communiquer a été nécessaire et porte actuellement ses fruits. Et il fût très bien épaulé justement par Raphaël Ibañez. Ce dernier, s'assure du bien vivre du groupe. Son charisme, reconnu par ses anciens coéquipiers, est un atout fort pour fédérer l'équipe de France. Son prédécesseur Jo Maso, manager de l'équipe de France de 1995 à 2011, déclarait ceci en 2007 concernant le talonneur, alors capitaine des Bleus :
Raphaël est un grand champion, il est sans doute le joueur le plus exemplaire du XV de France, il est extraordinaire, il est intelligent, il a la passion des autres, il fait partie des gens qui ont une réflexion permanente sur lui et sur le groupe et il est aujourd'hui dans la plénitude de ses moyens.
Augustin Pichot, demi de mêlée international argentin du Stade Français dans les années 2000, déclarait également à propos d'Ibañez : "Il est très franc, il ne biaise jamais, mais son trait de caractère le plus frappant est l'humilité. Cela lui assure le respect de nous tous". Ibañez est assurément la personne adéquate à son poste en tandem avec Galthié.
Le plus dur est à venir
Avec un Grand Chelem à la clef et une position de favorite qui se dessine en vue de la Coupe du Monde 2023, la gestion humaine sera mise à rude épreuve au sein du groupe France. Car pour l'instant, la vie de groupe a été gérée pendant des fenêtres de temps réduites, où un quotidien ne s'installait pas vraiment, contrairement en club. Fabien Galthié, en rôle de sélectionneur, où il délègue largement les tâches à ses adjoints, n'a pas eu à s'exposer énormément aux joueurs comme c'est le cas en club lors d'une saison. La préparation physique pré-mondial, qui aura l'allure de vie de club pour les Bleus avec une durée de deux mois de vie commune, sera un véritable défi.
Souvenons-nous par exemple qu'en 2003, l'ancien demi de mêlée, alors capitaine de la France, avait laissé ses coéquipiers le lendemain de la demi-finale perdue face à l'Angleterre, en s'envolant seul vers la Métropole. Et ce , alors qu'il restait la petite finale à disputer face à la Nouvelle-Zélande. Bien sûr, il parait improbable de voir une telle récidive. Mais il sera tout de même capital d'observer la vie de groupe et son unité, surtout dans un contexte de concurrence à certains postes. Raphaël Ibañez, à l'instar du Catalan Jo Maso avant lui, aura la lourde tâche d'assurer, la bonne entente entre les entraineurs et les joueurs, dans un contexte plus délicat.