Un modèle à bout de souffle
L’Irlande est une machine à gagner. Mais cette machine repose de plus en plus sur un seul moteur : le Leinster. Depuis des années, la province bleue règne sans partage sur le rugby domestique, truste les contrats fédéraux et attire les stars comme un aimant. Résultat : un rugby irlandais performant, certes, mais déséquilibré, vieillissant… et déficitaire.
Avec 18,4 millions d’euros de pertes en 2024, l’IRFU n’avait plus vraiment le choix. Il fallait réformer, et vite. La décision est tombée : à compter du 1er août 2026, les provinces devront financer 40 % des contrats des joueurs internationaux, contre 30 % aujourd’hui. Un changement majeur, qui touche surtout… le Leinster, détenteur de 11 contrats nationaux sur les 14 existants.
114 points en 2 matchs : Pourquoi le Leinster est-il encore plus fort que les saisons précédentes ?
Une réforme pour rééquilibrer le rugby irlandais
En clair, l’IRFU met fin à son soutien quasi-exclusif à la province de Dublin. Et redistribue les cartes. Les économies générées seront injectées dans la formation du Munster, du Connacht et de l’Ulster. Trois provinces qui, ces dernières années, ont trop souvent fait de la figuration sur la scène continentale.
« Il est impératif de maintenir une approche unifiée pour développer le rugby irlandais à tous les niveaux », insiste David Humphreys, directeur de la performance de la fédé, dans un communiqué. Derrière les mots, un objectif clair : faire émerger des talents dans toutes les régions du pays, et pas seulement à Dublin ou dans les écoles privées du Leinster.
Le paradoxe Leinster
Ce rééquilibrage intervient alors que le Leinster continue d’impressionner en URC, mais peine à concrétiser en Champions Cup, sans trophée majeur depuis 2021. Dans le même temps, ses concurrents internes peinent à exister, et l’équipe nationale commence à accuser le coup : défaite contre la France, cuillère de bois en U20, vieillissement de l’effectif…
Le rugby irlandais a besoin de sang neuf. Et cette réforme est aussi une réponse à une génération dorée (Aki, Lowe, Gibson-Park…) majoritairement issue de la naturalisation ou recrutée sur le tard, à l’image de Dan Sheehan, révélé bien après la sortie des structures de base. La relève doit être formée, pas importée.
120 game Blues veteran Rieko Ioane has taken up the sabbatical clause in his contract and will spend next season at Leinster 🍀
— The Blues (@BluesRugbyTeam) April 16, 2025
We will have him back in (the right) blue in 2027.
Still got work to do this year 🫡 pic.twitter.com/q8VpRf9n5R
Sauf que pendant ce temps-là, le Leinster n’attend pas. Quelques heures après l’annonce de la réforme, la province a officialisé l’arrivée de Rieko Ioane pour la saison prochaine. En remplacement de Jordie Barrett, s’il vous plaît. Une star en chasse une autre, comme si de rien n’était.
TRANSFERT. Le Leinster poursuit sa partie de Playstation et recrute Rieko Ioane en personne !
Un pas dans la bonne direction
La réforme de l’IRFU va dans le bon sens. Elle traduit une prise de conscience : l’équilibre des clubs est vital à long terme. Mais il faudra plus qu’un ajustement pour relancer le Connacht, Munster ou Ulster. Il faudra du temps, de la patience, et des résultats. Parce qu’en face, le rouleau compresseur bleu, lui, ne semble pas prêt de s’arrêter.